Harut Sassounian . La Turquie a conspiré avec Daech pour son invasion fallacieuse de la Syrie


Harut Sassounian . La Turquie a conspiré avec Daech pour son invasion fallacieuse de la Syrie

  • 10-09-2016 14:27:33   | USA  |  Articles et analyses

Depuis le début de la ‘guerre civile’ en 2011, la Syrie a été le centre d’intrigues internationales changeantes, tant politiques que militaires. Les diverses parties dans le conflit comprennent : le Hezbollah, l’Iran, Daech, Israël, la Jordanie, les combattants kurdes, le Liban, le Qatar, l’Arabie Saoudite et divers terroristes du monde entier, la Turquie, les États-Unis et d’autres membres de l’Otan. 
 
Le plus récent développement inquiétant est l’invasion turque de la ville frontalière de Jarablus, qui était occupée par Daech. Cependant, contrairement à ce qu’affirme la propagande turque, l’armée turque n’a pas envahi la Syrie pour chasser Daech et l’armée de l’air américaine n’a pas bombardé Jarablus pour faciliter l’avancée des troupes kurdes, selon David Phillips, directeur du programme Peace-Building and Rights de l’Institut pour l’Études des droits humains à l’université Colombia. Phillips a été conseiller et expert en Affaires étrangères auprès du Département d’État sous les mandats des présidents Clinton, Bush, and Obama. 
 
Les plans de la Turquie étaient d’empêcher toute percée des combattants kurdes des YPG (Unités de protection du peuple) dans le nord-ouest de la Syrie, qui ont été les alliés militaires les plus fiables des États-Unis dans la lutte contre Daech, alors qu’Erdogan les traite de terroristes ! 
 
Dans son article du Huffington Post, Phillips a révélé que « les islamistes soutenus par la Turquie n’ont jamais engagé Daech dans la prétendue bataille de Jarablus. Avant l’invasion, Ankara avait conclu un accord avec Daech. Au lieu de résister, les forces de Daech ont simplement changé d’uniformes, prenant ceux de la FSA (Armée syrienne libre). Jarablus a été ‘libérée’ de Daech sans qu’un seul coup de feu n’ait été tiré. » Avant l’invasion turque, Daech avait évacué tous les civils de Jarablus, car ils ne voulaient pas « que des civils puissent identifier les nouveaux membres portant les uniformes de la FSA comme étant des combattants de Daech », a écrit Phillips. 
 
« Il n’est pas surprenant qu’Erdogan et Daech aient conclu un accord. Daech et le parti d’Erdogan, l’AKP, le Parti pour la justice et le développement, ont la même ligne idéologique », a affirmé Phillips, car « ce sont tous les deux des branches de la confrérie des Frères musulmans. En dépit des démentis officiels, il y a une multitude de preuves attestant que la Turquie a fourni des armes, de l’argent et un soutien logistique aux islamistes en Syrie début 2014. La Turquie a également aidé Daech en transportant son pétrole et en le vendant sur le marché international. Chaque mois, environ 500 islamistes transitent toujours par la Turquie pour aller en Syrie. » 
 
Les dirigeants turcs n’ont pas caché leurs véritables intentions. Erdogan a annoncé que son objectif est de s’en prendre aux YPG et « aux groupes terroristes qui menacent notre pays. » Le ministre des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a promis qu’Ankara « ferait ce qui est nécessaire » pour tenir les combattants kurdes loin de la frontière. 
 
Les actions militaires détournées de la Turquie dans le nord de la Syrie ne plaisent pas à Washington. Un haut responsable du Pentagone, Brett McGurk, a dit à CNN que « les Turcs ne se sont jamais souciés de Jarablus jusqu’à ce que les Kurdes aient décidé d’y aller. » McGurk a qualifié les attaques turques contre les combattants kurdes « d’inacceptables et sources d’une grande inquiétude » pour les États-Unis. 
 
L’éditeur de Veterans Today a sévèrement critiqué l’invasion de la Syrie, comme cela se reflète dans son explication cynique : « Les troupes turques qui ont été en Syrie pendant des années, habillées en « Daech », sont tout simplement retournées en Turquie, ont pris un bon bain, se sont rasées et ont remis leurs uniformes turcs pour repartir en Syrie. » 
 
Saadeddine Somaa, un Arabe syrien qui s’est joint à l’incursion turque en Syrie, a exprimé au journal The New York Times sa déception d’avoir été dupé, ayant dû combattre les Kurdes au lieu de Daech. 
 
L’article de The New York Times insiste sur le fait qu’en raison des luttes internes, les groupes rebelles « risquent de renforcer la critique selon laquelle ils sont, au mieux, des représentants turcs et américains et, au pire, des alliés de facto de Daech. » De plus, « les frappes aériennes turques ont fait 35 victimes civiles dans les villages tenus par les Kurdes. Une vidéo en ligne a montré des rebelles frappant des miliciens kurdes prisonniers. » Certains combattants ayant accompagné les troupes turques lors de l’invasion en Syrie, tels que les membres du Mouvement Nour al-Din al-Zinki, « ont été accusés d’avoir des liens avec les groupes affiliés à Al-Qaida » et « ont été largement condamnés quand un groupe de ses combattants s’est filmé en train de décapiter un enfant prisonnier… La participation [d'al-Zinki] à l’opération de Jarablus a montré qu’elle n’a pas pu être complètement évitée, du moins par la Turquie. 
 
David Phillips a conclu son article du Huffington Post avec une prédiction inquiétante : « La Syrie sera le Waterloo d’Erdogan. Le gouvernement américain ne doit pas être lié au navire en perdition de la Turquie. » 
 
 
 
  -   Articles et analyses