Harut Sassounian. Dons pour les campagnes électorales… ou corruption légale ?


Harut Sassounian. Dons pour les campagnes électorales… ou corruption légale ?

  • 30-09-2016 18:13:10   | USA  |  Articles et analyses

Cet article est surtout destiné aux lecteurs hors des États-Unis, qui connaissent peut-être mal la législation américaine sur les dons pour les campagnes électorales. Il est intéressant de noter que même les Américains sont souvent désorientés quant aux lois complexes concernant les limites des dons politiques qui diffèrent selon que l’élection a lieu au niveau local, fédéral ou de l’État. 
 
Examinons de plus près les contributions destinées aux élections fédérales, y compris les élections présidentielles. La limite du don par personne est fixée à 2700 dollars par élection. Si la plupart des Américains font don de montants plus petits, certains contribuent légalement à hauteur de dizaines de milliers de dollars et parfois de millions de dollars ! 
 
Une personne peut faire un don de 10°000 dollars par an à un État, un district ou au Comité d’un parti politique local et de 33°400 dollars au Comité d’un parti national. Toutefois, une personne peut verser 100 200 dollars par an pour chaque type de frais liés à l’élection. Il existe également des « PAC » (Comités d’action politique) et des « super PAC » qui peuvent faire des dons illimités. 
 
Les deux candidats démocrate et républicain s’engagent dans diverses pratiques certes parfaitement légales, mais pourtant discutables, pour dépasser et de loin les 2700 dollars de dons de campagne par personne. Pour illustrer ce point, laissez-moi citer un email que j’ai reçu récemment de la part de la campagne d’Hillary Clinton. 
 
Hillary Clinton, candidate démocrate à la présidentielle, devait se rendre à Beverley Hills en Californie le 13 septembre, afin de participer à deux événements exclusifs visant à lever des fonds pour sa campagne. Malheureusement en raison de son problème de santé, son voyage a été repoussé. 
 
Le premier événement devait avoir lieu en fin d’après-midi le 13 septembre au domicile de Seth MacFarlane avec un spectacle spécial de Lionel Richie. Cet email annonçait que toute personne versant 33 400 dollars avait droit à « un repas, choix de place et photo » avec Hillary Clinton. Ceux qui faisaient un don de 10 000 dollars n’avaient droit qu’à « un repas et choix de place », mais pas de photo avec la candidate. Pour 5000 dollars, pas de choix de place, ni de photo avec l’ex-première dame, juste le repas. 
 
Dans la soirée, un autre événement plus exclusif, par conséquent permettant de lever davantage de fonds, était prévu. Ceux qui pouvaient se permettre de faire un don de 100°000 dollars par couple avaient le privilège de participer à une « conversation et un dîner avec Hillary Rodham Clinton au domicile de Diane von Furstenberg et Barry Diller. » L’événement était présidé par « Diane von Furstenberg et Barry Diller, Jane et Michael Eisner, Karen et Russell Goldsmith, et Edgar Sargsyan. » 
 
Une semaine après les collectes de fonds prévues d’Hillary Clinton, son colistier, Time Kaine, candidat au poste de vice-président, devait faire deux apparitions en Californie du Sud. Le 19 septembre, un déjeuner offert par Jay Sures à Beverly Hills était annoncé en termes de « Conversation avec Tim Kaine ». Seuls ceux qui avaient fait un don de 27°000 dollars pouvaient participer à la réception avec le candidat. Ceux qui avaient fait don de 10°000 dollars n’avaient droit qu’à une photo avec le candidat à la vice-présidence (pas de réception) et pour 2700 dollars, il n’y avait que le déjeuner (pas de réception pas de photo) ! 
 
Plus tard ce soir-là, un événement plus onéreux, intitulé « Latinos pour Hillary, dîner avec Tim Kaine » a eu lieu au domicile d’Eva Longorio à Los Angeles. En versant 100°000 dollars, on avait le droit d’assister à la réception, au dîner et à la photo avec le candidat à la vice-présidence, Tim Kaine. Pour 33°000 dollars, le donateur pouvait seulement dîner et faire une photo, et ceux qui ne pouvaient verser que 10°000 dollars avaient seulement le droit au dîner ! 
 
Si certains font de grands dons de campagne pour côtoyer les hommes politiques et les stars qui assistent à ces activités de financement, d’autres s’attendent à jouir ensuite de faveurs personnelles ou commerciales de la part d’un candidat qui peut devenir président des États-Unis. Ces dons sont parfaitement légaux, car les candidats révèlent le non du donateur et fournissent un récépissé. Dans de nombreux pays, remettre de l’argent aux candidats présidentiels est qualifié de corruption. 
 
Certains hommes politiques américains se vantent de ne pas accepter de dons des PAC ou des corporations pour leur campagne électorale, afin de ne pas être redevables des généreux donateurs après l’élection ! Dans un email récent, le député John Sarbanes (démocrate-Maryland) a déclaré qu’il n’acceptait pas l’argent des PAC, parce que « je ne veux pas me laisser faire. » Il a insisté sur le fait qu’il croit à « un gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ! » 
 
 
De Harut Sassounian 
The California Courier 
 
 
 
 
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