Harut Sassounian. Un Arménien important pro-Erdogan d’Istanbul participe à la propagande pro-turque


Harut Sassounian. Un Arménien important pro-Erdogan d’Istanbul participe à la propagande pro-turque

  • 01-10-2018 16:11:55   | USA  |  Articles et analyses

Malgré les nombreuses violations des droits culturels et religieux arméniens commises en Turquie, certains Arméniens d’Istanbul encensent le régime turc et en particulier son président fasciste, Recep Tayyip Erdogan. 
 
Ces quelques Arméniens pro-Erdogan, qui jouissent de privilèges spéciaux et d’un accès aux officiels turcs de haut rang, se présentent comme les protecteurs des intérêts de la communauté arménienne locale. Mais en réalité, leurs motifs sont égoïstes. Soit ils ont des intérêts personnels commerciaux avec les dirigeants turcs corrompus, soit ils cherchent à conserver leurs positions non méritées dans les institutions communautaires arméniennes. L’un de ces individus est Bedros Sirinoglu, président du Conseil d’administration de l’hôpital arménien Sourp Perguitch à Istanbul. 
 
Dans une interview récente avec la journaliste Pinar Isik Ardor du Forum USA, un journal turco-américain, Sirinoglu a fait plusieurs fausses déclarations sur la communauté arménienne en Turquie et a déformé les faits du génocide. 
 
Les paroles de Sirinoglu étaient « choquantes » selon le journal arménien d’Istanbul, Nor Marmara. Sirinoglu a déclaré au Forum USA que les Arméniens n’ont jamais vécu aussi confortablement que sous la gouvernance d’Erdogan ! Il a également fait de fausses déclarations sur le génocide arménien, disant que « les événements de 1915 ont été organisés par des puissances étrangères dans le but de démanteler et de renverser l’Empire ottoman. » 
 
En outre, Sirinoglu a dit au Forum USA : « Avant l’époque Erdogan, nous ne pouvions même pas peindre ou réparer nos églises. Nous pouvions le faire uniquement quand l’État faisait semblant de ne pas le remarquer. » Sirinoglu a plusieurs fois affirmé qu’il avait fait de bonnes choses pour la communauté arménienne de Turquie. Il y a plusieurs années, il a dit qu’il avait sollicité une rencontre avec Erdogan, ce qui lui a immédiatement été accordé. Il a demandé à Erdogan la permission de placer une croix sur le dôme de l’église arménienne de la Sainte-Croix à Aghtamar. Il aurait dit à Erdogan : « De même que vous ne pouvez pas avoir de mosquée sans un minaret, vous ne pouvez pas avoir d’église sans croix. » Sirinoglu a prétendu que « Erdogan a fait placer la croix sur l’église d’Aghtamar en une nuit. » Si Sirinoglu a autant d’influence, pourquoi n’a-t-il pas demandé à Erdogan de rétablir le statut d’Aghtamar en tant qu’église arménienne et non d’en faire un « musée », et d’autoriser les services religieux une fois par an seulement ! Sirinoglu a également ignoré le fait que les Arméniens et d’autres personnes dans le monde, y compris le patriarche arménien d’Istanbul, avaient demandé qu’une croix soit placée sur le dôme de l’église. Sirinoglu n’est pas le seul à avoir formulé cette requête. 
 
Les qualifiant de « scénarios fictifs », Sirinoglu a contredit les divers rapports occidentaux indiquant que les droits religieux sont restreints en Turquie. Sirinoglu, âgé de 67 ans, a déclaré au journal turc : « Depuis la période de mon enfance, les Arméniens n’ont pas eu de problèmes. » 
 
Lorsque la journaliste turque a rappelé à Sirinoglu que ses paroles ne plaisent pas à certains Arméniens, il a répondu : « Si vous ne dites pas ce qu’ils veulent, ils deviennent hostiles. Je soutiens l’État. Je ne trahis pas mon propre pays. Je suis arménien, mais je suis un compatriote turc. Notre foi nous ordonne d’être fidèles à l’État. Notre Bible prêche la même chose. » 
 
La remarque de Sirinoglu portant le plus à controverse se rapporte à son interprétation erronée du génocide arménien. Il a déclaré « qu’il aborde avec doute les chiffres [des victimes arméniennes] avancés pour 1915. » Il a ajouté que « Les Arméniens, les Juifs et les Grecs étaient prospères à cette époque, et c’est la raison pour laquelle il y a eu une animosité envers eux. À présent, la population arménienne décroît. Le taux de natalité est bas. Le taux de mortalité est élevé. Il y a aussi des mariages mixtes. » 
 
Lorsque la journaliste turque a demandé à Sirinoglu si les Arméniens, les Grecs et les Juifs partageaient le même point de vue, Sirinoglu a répondu par l’affirmative et a ajouté : « Nous sommes en désaccord uniquement sur les événements de 1915. Le patriarche grec Bartholomée a une position réservée et reposant sur des principes, en ce qui concerne le gouvernement aussi. Les Juifs aussi aiment l’État, mais ce sont aussi des hommes de principe. Ils n’abandonnent pas leurs principes. Les Juifs vivant ici ne trahissent pas la Turquie, mais ils sont liés à Israël. » 
 
Pour finir, Sirinoglu a répondu à une question concernant la récente baisse de la valeur de la livre turque. Répétant la même réponse que celle d’Erdogan, Sirinoglu a accusé les puissances étrangères d’avoir orchestré « ce jeu contre l’économie turque. » 
 
Ce n’est pas la première fois que Sirinoglu fait de fausses déclarations sur le génocide arménien. Par exemple, après sa réunion avec le Premier ministre Erdogan en 2010, il a dit aux médias turcs que « 1915 n’était rien de plus qu’une querelle entre des amis qui s’aiment, fomentée par des tiers. » Il a poursuivi en disant que son « grand-père faisait partie des victimes, comme de nombreux Turcs aussi. » 
 
En 2010, les Arméniens d’Istanbul avaient lancé une pétition annonçant que Sirinoglu n’était pas leur leader et ne représentait pas la communauté arménienne. Irrités par les déclarations de Sirinoglu, les pétitionnaires avaient souligné : « Nous vivons dans une Turquie différente », pas la Turquie décrite par Sirinoglu ! 
 
 
 
 
De Harut Sassounian 
The California Courier 
Éditorial du 27 septembre 2018 
 
©Traduction de l’anglais C.Gardon pour le Collectif VAN – 27 septembre 2018 – www.collectifvan.org 
 
 
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