De : Harut Sassounian. La guerre du Karabagh arrive à Hollywood, à l’aimable invitation de l’Azerbaïdjan


De : Harut Sassounian. La guerre du Karabagh arrive à Hollywood, à l’aimable invitation de l’Azerbaïdjan

  • 14-12-2012 01:29:37   | USA  |  Articles et analyses

 

De : Harut Sassounian 
Éditeur de : The California Courier 
Éditorial de Sassounian du 6 décembre 2012 
 
Le conflit du Karabagh (Artsakh) entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan n’est nullement une carte blanche donnée à quiconque pour faire des déclarations racistes et insultantes sur les populations vivant de l’autre côté de la frontière. Même en temps de guerre, il existe des normes civilisées de comportement. 
Étant donné que ces deux pays voisins sont en pleine période de négociations délicates pour résoudre leur conflit épineux, il est complètement irresponsable de jeter de l’huile sur le feu en incitant à la haine interethnique et interreligieuse, et d’enflammer les émotions refoulées ! Si certains Arméniens se sont laissés allés à quelques crises de colère, les dirigeants de l’Azerbaïdjan ont élevé la création de déclarations racistes et de menaces anti arméniennes au rang de politique d’État ! 
Ce comportement méprisable explique pourquoi le conflit de l’Artsakh a débordé en Hongrie, (en utilisant une hache), au Mexique (en offrant 5 millions de dollars pour une statue d’Aliyev érigée dans un parc, avec une plaque anti-arménienne), et dans bien d’autres pays du monde, situés à des milliers de kilomètres de la scène du conflit. 
Les Azéris ont à présent décidé de mener leur guerre contre l’Artsakh à Hollywood, l’Arménie ayant officiellement présenté pour une nomination à un oscar, un film inoffensif intitulé If Only Everyone (Si seulement tout le monde), dans la catégorie du Meilleur film étranger. La première américaine du film a eu lieu samedi dernier dans le cadre du Festival International du Film ARPA à Hollywood. 
Le film arménien relate l’histoire d’une jeune fille russe, dont le père a été tué pendant la guerre de l’Artsakh. Vingt ans plus tard, elle se rend en Arménie dans l’espoir que le commandant de l’unité militaire de son père l’aide à retrouver sa tombe sans nom. Après de longues recherches, la jeune fille découvre que la tombe de son père se trouve de l’autre côté de la frontière, en Azerbaïdjan. Accompagnée du commandant arménien, elle passe subrepticement la frontière profitant de l’obscurité de la nuit. Alors qu’elle plante un bouleau près de la tombe de son père, ils sont confrontés à un berger azéri qui menace de les abattre. En apprenant que le père de la jeune fille est enterré là, l’Azéri les laisse partir sains et saufs, après leur avoir dit, le cœur lourd, que son fils de 10 ans a également été tué pendant la guerre, en sautant sur une mine. Le berger azéri explique qu’il ne peut pas se rendre sur la tombe de son fils, car elle se trouve en Artsakh. Le film s’achève sur une note d’espoir et une scène merveilleuse, la jeune fille russe et son compagnon arménien plantent un autre arbre, cette fois-ci, à côté de la pierre tombale de l’enfant azéri. 
Bien que le film ne contienne ni rhétorique anti-azérie ni scènes de la guerre du Karabagh, les journalistes azerbaidjanais l’ont attaqué durement sans même en avoir vu un seul extrait. Apparemment, le seul fait que le film soit arménien a été une raison suffisante pour qu’ils essaient d’empêcher sa présentation pour l’Academy Awards ! Les médias azéris l’ont faussement qualifié de « film de propagande » et déclaré que c’était un exemple de la façon dont « la guerre de l’information était lancée par l’Arménie contre l’Azerbaïdjan.» 
Aggravant la situation, Ali Hajizade, un journaliste azéri, s’en est pris à Teni Melidonian, l’attachée de presse de l’Academy of Motion Picture Arts and Sciences, pour la simple raison qu’elle est d’origine arménienne ! Dans le cadre de ses responsabilités officielles, elle avait écrit un communiqué de presse qui citait les 71 pays étrangers ayant soumis un film dans la catégorie Film étranger, qui comprenaient l’Arménie, la Turquie et l’Azerbaïdjan ! 
Il est important pour les Azéris de comprendre que ces remarques racistes n’ont aucune place dans une société civilisée. Le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan a besoin d’être résolu par le biais de négociations pacifiques, et non en hurlant des insultes xénophobes. 
Un jour, lorsque la paix reviendra dans la région, les Arméniens et les Azéris devront vivre côte à côte, non pas en tant qu’ennemis, mais en voisins et amis. Les Azéris qui ont entrepris de semer les graines de la haine et du racisme sont non seulement en train de ternir leur propre réputation, mais également d’aggraver et de prolonger inutilement l’antagonisme entre les deux peuples. 
Heureusement, les Arméniens se sont abstenus d’exercer des représailles contre le film soumis aux oscars par l’Azerbaïdjan. Les querelles politiques ne devraient pas se transformer en guerres culturelles ou en vendettas personnelles. Que le meilleur film gagne, peu importe qu’il soit produit par un Arménien, un Azéri ou un Turc ! L’Académie annoncera la courte liste des neuf films qui concourront dans la catégorie Film en langue étrangère, le 20 décembre 2012, les cinq finalistes le 10 janvier 2013 et le lauréat de l’oscar le 24 février 2013. 
Si tout le monde est coproduit par Tereza Varzhapetyan et l’acteur primé et réalisateur Michael Poghosyan, qui joue le rôle du commandant arménien retraité. Natalia Belyauskene est la réalisatrice et Ekaterina Shitova joue le rôle de la jeune fille russe. Le film a été diffusé à Erevan, Moscou, Paris, Bucarest et Hollywood et il a gagné plusieurs récompenses à des festivals cinématographiques internationaux. 
 
©Traduction de l’anglais C.Gardon pour le Collectif VAN – 6 décembre 2012 – www.collectifvan.org
 
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