De : Harut Sassounian. Rapport du renseignement américain : tous les Arméniens exigent de la Turquie la restitution des territoires


De : Harut Sassounian. Rapport du renseignement américain : tous les Arméniens exigent de la Turquie la restitution des territoires

  • 02-08-2013 11:39:35   | USA  |  Articles et analyses

De : Harut Sassounian 
Éditeur de : The California Courier 
Éditorial de Sassounian du 1er août 2013 
 
La demande à la Turquie de restitution de territoires, récemment annoncée par le procureur général de l’Arménie, a grandement attiré l’attention des Arméniens du monde entier et a généré de vives critiques de la part du gouvernement turc. Si c’est la première fois qu’un responsable officiel soulève la question depuis l’indépendance du pays en 1991, la demande en elle-même n’est pas nouvelle. Cela fait des décennies que les Arméniens cherchent à obtenir la restitution de leurs territoires historiques actuellement situés en Turquie. 
Un document confidentiel de 1943, déclassifié par l’Agence centrale de renseignement (CIA), révèle que le gouvernement américain était tout à fait informé des demandes arméniennes de reconnaissance des « atrocités » et de la restitution des « provinces » occupées par la Turquie. 
Le document en date du 13 décembre 1943, rédigé par l’Office of Strategic Services (OSS, Bureau des services stratégiques), l’organisme qui précédait la CIA, déclarait : « Toute la presse arménienne des États-Unis se montre très active pour que ses lecteurs gardent à l’esprit les massacres des Arméniens commis par les Turcs. Craignant que les atrocités des forces de l’Axe de la guerre actuelle [la Seconde Guerre mondiale] n’éclipsent les atrocités de la précédente, lorsqu’elle prendra fin, ils sont soucieux de maintenir vivante la cause arménienne contre la Turquie. Les Arméniens ont des griefs passés, mais aussi présents contre la Turquie, dont l’impôt sur la fortune, ‘Varlik’, qui touche beaucoup plus durement les Arméniens que toute autre minorité en Turquie. Ce qui est encore plus impardonnable aux yeux des Arméniens, c’est le fait que la Turquie conserve des provinces, qui, ils en sont fermement convaincus, appartiennent légitimement à l’Arménie. La restitution de ces provinces à l’Arménie est l’objectif de tous les Arméniens. » Dans une autre partie du document, l’OSS rapportait avec justesse que « les Arméniens, presque sans exception, éprouvent des sentiments de doutes profonds, d’hostilité et de peur envers la Turquie. » 
Un second document confidentiel déclassifié, daté du 31 juillet 1944, porte un titre surprenant : « Les Dachnaks se tournent vers la Russie soviétique. » L’OSS indiquait que : « La Fédération révolutionnaire arménienne (Dachnak), qui était catégoriquement antisoviétique, a officiellement changé d’opinion et le basculement vers l’Union soviétique pour lui demander son soutien, qui a augmenté graduellement et est plus perceptible ces derniers mois, a culminé avec l’adoption d’une politique pro-soviétique lors de la convention annuelle de la Fédération qui a eu lieu à Boston la première semaine de juillet. » Ce rapport de l’OSS a été préparé lorsque l’Union soviétique a annoncé son intention de réclamer les provinces orientales de la Turquie (Kars, Ardahan et Surmalou) lors d’un règlement après la Seconde Guerre mondiale. La demande soviétique a été soutenue par l’Église arménienne, le gouvernement soviétique arménien et la diaspora, y compris la Fédération révolutionnaire arménienne antisoviétique. (FRA). 
L’OSS a habilement déclaré : « Les Dachnaks n’ont jamais renoncé à leur rêve d’une Arménie libre et indépendante, y compris à l’irrédentisme turc, qui les a maintenus en désaccord avec l’URSS depuis que l’Arménie a été établie en tant que [illisible] soviétique en 1920. …La perspective d’indépendance s’estompant, les Dachnaks, désormais en faveur des soviets, dirigent leur attention vers l’acquisition des provinces turques de l’Arménie par la République soviétique d’Arménie. » 
Expliquant les attentes de la FRA après la guerre, l’OSS a affirmé : « Si, comme le croient et l’espèrent les Dachnaks, la Turquie reste neutre [dans la Seconde Guerre mondiale], elle sera dans une position très vulnérable, et l’un des éléments du prix de sa neutralité, selon M. [James] Mandalian [éditeur du journal de la FRA à Boston, Hairenik], sera la cession de l’Arménie turque à l’Arménie soviétique. » 
Le document de 1943 de l’OSS contient également un long rapport sur la presse arméno-américaine, concentrant son attention sur 6 des 17 journaux arméniens des États-Unis : Hairenik et Asbarez (dachnak), classifiés comme « nationalistes-de droite », Baikar, Nor Or (ramgavar) etEritassard Hayastan (hentchag), classifiés comme « libéraux » et Lraper (Armenian Progressive League of America – Ligue progressiste arménienne d’Amérique), classifié comme « communiste-gauchiste ». Les deux derniers journaux ne sont plus publiés aujourd’hui. 
Selon l’OSS, Hairenik et Asbarez sont « fortement nationalistes, antisoviétiques et anticommunistes » tandis que Baikar est « résolument opposé aux Dachnaks et à leurs principes. Les ramgavars ont accepté l’incorporation de l’Arménie à l’Union soviétique, comme moyen le plus satisfaisant pour résoudre les problèmes arméniens et de nombreux articles sont publiés dans Baikar louant le régime soviétique en Arménie, en particulier ses rapports avec l’Église apostolique arménienne. » 
L’OSS a estimé que les 95 000 Arméniens se trouvant aux États-Unis en 1943, installés principalement dans le Massachusetts, à New York et en Californie, « conservent un vif intérêt pour les affaires de leur patrie [l’Arménie soviétique], bien que très peu, s’il en est, y retourneraient. »  
 
©Traduction de l’anglais C.Gardon pour le Collectif VAN – 1er août 2013 - www.collectifvan.org
 
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