Harut Sassounian. Le pays du soleil levant : un terrain fertile pour les Arméniens


Harut Sassounian. Le pays du soleil levant : un terrain fertile pour les Arméniens

  • 11-11-2013 17:39:59   | USA  |  Articles et analyses

Le mois dernier, j’ai visité pour la première fois ce pays incroyable qu’est le Japon. 
À la minute où j’ai foulé le sol de l’aéroport Narita à Tokyo, j’ai eu l’impression d’être arrivé dans un pays irréel – presque trop beau pour être vrai ! 
La première chose que l’on remarque, c’est l’extrême politesse du peuple japonais. Leur façon de s’incliner plusieurs fois pour saluer les invités est incomparablement plus respectueuse que notre habituelle poignée de main ordinaire. J’ai été étonné de découvrir que tout le monde bénéficie du même service excellent, sans frais supplémentaires ! Personne ne reçoit de pourboires, y compris les serveurs et les préposés au stationnement. 
Le Japon est d’une propreté impeccable. Pas un seul détritus en vue. Pas de piles de déchets ou d’ordures. Vous ne verrez pas une seule voiture dans les rues avec une bosse ou grain de poussière. Même les camions transportant des matériaux de construction sont recouverts d’un filet et ils sont arrosés avant de quitter le lieu de chargement, afin de ne pas répandre des saletés dans les rues de la ville. Étonnamment, après qu’un typhon a frappé directement Tokyo, il n’y avait pas de débris dans les rues. 
Pour couronner le tout, il y a très peu de criminalité au Japon, en raison du comportement calme de la population et de l’absence d’armes à feu. Malgré les trottoirs bondés de Tokyo, tout le monde vaque à ses affaires, sans se bousculer, se disputer ou élever la voix. Les conducteurs respectent le code de la route et conduisent de façon ordonnée, sans couper la route aux autres ou sans klaxonner. 
Beaucoup de gens dans les rues portaient des masques médicaux. On aurait pu croire que c’était une protection contre la grippe ou une autre maladie des passants. Il s’avère que les porteurs de masques étaient ceux qui avaient la grippe. Ils étaient extrêmement attentionnés, ne voulant pas transmettre leurs germes aux autres ! 
Outre la visite de sanctuaires et d’anciens palais japonais, j’ai eu l’occasion de participer à des activités liées à l’Arménie dans ce pays lointain. J’ai été heureux d’apprendre que la République d’Arménie a une ambassade à Tokyo. L’ambassadeur Hrant Pogosyan et l’attachée Monica Simonian m’ont aimablement reçu et m’ont informé de leurs efforts inlassables pour promouvoir des relations amicales entre les deux pays. Nous avons discuté des possibilités de collaboration entre la communauté arménienne des États-Unis et l’ambassade d’Arménie au Japon, en particulier lors du centenaire du génocide arménien à venir. 
Le concert organisé par l’ambassade d’Arménie pour célébrer le 110e anniversaire de la naissance d’Aram Khatchatourian a été un plaisir totalement inattendu. Trois grands musiciens, les pianistes Armen Babakhanian et Juliette Vardanyan, et le violoncelliste Aram Talalyan étaient spécialement venus d’Arménie pour cette performance d’un soir. Le public japonais, des diplomates étrangers et quelques étudiants et hommes d’affaires arméniens ont été très impressionnés par la musique de Khatchatourian et la virtuosité des interprètes. J’ai même rencontré un chercheur japonais qui parlait couramment l’arménien. Je n’avais encore jamais entendu l’arménien prononcé avec un accent japonais ! 
Des amis japonais avaient gentiment organisé pour moi une rencontre avec des PDG de plusieurs grandes entreprises à Tokyo et à Kyoto afin de discuter des possibilités d’investissements en Arménie. J’ai été très impressionné par l’état des connaissances du laboratoire de recherche de l’Université de Kyoto sur les cellules souches. 
Plus tard ce jour-là, j’ai eu l’occasion unique de faire une conférence devant un groupe d’étudiants brillants et de leurs professeurs. Ils parlaient très bien l’anglais et ont posé de nombreuses questions, même si l’on m’a dit que les étudiants japonais ne posent pas de questions habituellement. Mon intervention a couvert le génocide arménien, le conflit de l’Artsakh (Karabagh), la guerre civile en Syrie, le printemps arabe, la question controversée des femmes de réconfort et la nécessité de trouver une résolution pacifique aux conflits. 
De retour à Tokyo, mes hôtes m’ont surpris en me présentant une copie du numéro du journal en date du 4 octobre 1998, provenant des archives du The Japan Times, qui comportait une demi-page sur mes efforts humanitaires pour l’Arménie au nom du Fonds arménien uni. 
Ma dernière réunion s’est déroulée avec trois hauts fonctionnaires du gouvernement japonais, avec qui j’ai longuement discuté des relations entre le Japon et l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Turquie, la Chine, la Russie et la Corée du Sud. 
Mes conversations avec des étudiants japonais et des chefs du gouvernement m’ont fait réaliser que les Arméniens ont pris l’habitude de concentrer tous leurs efforts politiques sur le Moyen-Orient, l’Europe, l’Amérique du Nord et du Sud, et qu’ils ignorent totalement le grand nombre de pays stratégiquement importants en Asie. 
Il peut être politiquement et économiquement plus productif d’élargir notre attention à des pays dont les citoyens ne savent presque rien sur l’Arménie et les Arméniens. 
 
Harut Sassounian 
The California Courier 
Éditorial du 7 novembre 2013 
 
©Traduction de l’anglais C.Gardon pour le Collectif VAN – 7 novembre 2013 – www.collectifvan.org
 
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