Harut Sassounian.L’Arménie soutient le procès du Catholicossat contre la Turquie


Harut Sassounian.L’Arménie soutient le procès du Catholicossat contre la Turquie

  • 30-09-2014 10:13:02   | USA  |  Articles et analyses
Plus de 1000 participants ont assisté à la conférence Arménie-Diaspora à Erevan, organisée par le Ministère de la Diaspora, et ont bruyamment acclamé le Catholicos Aram I de la Grande Maison de Cilicie, lorsqu’il a annoncé, contre toute attente, que le Catholicossat allait intenter un procès devant un tribunal turc pour demander la restitution de ses biens confisqués pendant le génocide de 1915-1923. Sa Sainteté a expliqué qu’avant de prendre cette importante décision, il avait consulté des experts juridiques internationaux ces deux dernières années. 
 
Déclarant que rester indifférent aux violations des droits des Arméniens équivalait à une trahison, il a exhorté les Arméniens à sortir la question arménienne des limites étroites de la reconnaissance et de la condamnation, et de transcender l’idée que la reconnaissance du génocide est le but ultime de la Cause arménienne. Considérant qu’il est grand temps de transférer les revendications arméniennes dans le champ juridique, Sa Sainteté a annoncé que l’Église apostolique arménienne de Cilicie allait incessamment intenter un procès à la Cour Constitutionnelle de Turquie, pour exiger la restitution de son quartier général d’autrefois, le Catholicossat de Sis. Si le tribunal turc refuse le procès, ce qui est fort probable, le Catholicossat fera alors appel à la Cour européenne des droits de l’homme, a déclaré le Catholicos. Il a également exprimé l’espoir que ce procès ouvrira la voie à d’autres poursuites juridiques contre la Turquie pour obtenir la restitution des propriétés publiques, privées et religieuses appartenant aux Arméniens. 
 
Si cela est une excellente nouvelle pour tous ceux qui prônaient depuis des années d’intenter des procès à la Turquie, ces derniers requièrent que les meilleurs avocats internationaux les préparent minutieusement. De plus, indépendamment de la juste valeur d’une cause, personne ne peut garantir un résultat positif au tribunal, étant donné les diverses influences extérieures sur le judiciaire et les points techniques utilisés comme excuse pour rejeter un procès basé sur un grief vieux d’un siècle. 
 
Le Catholicos a fait allusion à ces obstacles dans son allocution, reconnaissant le fait que « le cadre de travail du droit international n’est pas favorable à notre cause ». Plus inquiétant encore, il a semblé faire fi de l’effet dévastateur qu’un procès perdu aurait sur la Cause arménienne, en déclarant que « si nous perdons le procès, nous serons quand même gagnants, car nous aurons rappelé à la communauté internationale et aux génocidaires que le peuple arménien continue d’exiger ses droits, quel que soit le temps écoulé depuis le génocide. 
 
Le gouvernement turc ne manquera pas d’exploiter un jugement aussi négatif, et déformera sa victoire dans le monde en entier en déclarant qu’il représente un rejet de toutes les revendications arméniennes. 
 
Allant au-delà de l’initiative du Catholicossat, Sa Sainteté a exhorté le gouvernement arménien à intenter son propre procès contre la Turquie, devant la Cour internationale de Justice (Cour mondiale), où seuls les États sont en droit de le faire. L’année dernière, lors de la conférence internationale des avocats arméniens, sponsorisée par le Ministère de la Diaspora, un groupe de travail a été formé sous les auspices de Gagik Haroutunian, juge en chef de la Cour Constitutionnelle d’Arménie, afin d’étudier les implications juridiques d’un procès contre la Turquie auprès de la Cour mondiale. Le groupe de travail serait en train d’évaluer les options juridiques qui s’offrent à la République d’Arménie. 
 
Étant donné l’approche prudente du gouvernement arménien en ce qui concerne un procès contre la Turquie, il a été très surprenant, lors de la conférence Arménie-Diaspora qui a eu lieu le 20 septembre 2014, que le ministre des Affaires étrangères Edouard Nalbandian, interviewé par un journaliste qui lui demandait quelle était sa réaction à l’annonce du procès que le Catholicossat de Cilicie allait intenter à la Turquie, ait répondu avec enthousiasme et sans hésitation aucune : « Il ne peut pas y avoir deux opinions sur ce sujet. Une initiative aussi importante ne peut qu’être soutenue. » 
 
Par coïncidence, on a remis aux participants à la conférence l’introduction et le résumé analytique d’un long rapport intitulé : Résolution avec justice : réparations pour le génocide arménien. Financé à l’origine par des fonds provenant de la Fédération révolutionnaire arménienne, le rapport a été préparé par le Groupe d’études sur les réparations pour le génocide arménien, composé d’Alfred de Zayas, Jermaine O. McCalpin, Ara Papian et Henry C. Theriault. George Aghjayan en était le consultant. Ce rapport très complet examine le cas des réparations du point de vue juridique, historique et éthique. 
 
Il est clair qu’à la veille du centenaire du génocide, plusieurs initiatives importantes sont en cours pour une quête de justice devant divers tribunaux, en raison des immenses pertes tant humaines qu’économiques subies par le peuple arménien lors du génocide de 1915-1923. 
 
 
Harut Sassounian 
The California Courier 
 
 
 
 
 
 
 
 
  -   Articles et analyses