Harut Sassounian. La majorité républicaine au Congrès jette une ombre noire sur les intérêts arméniens


Harut Sassounian. La majorité républicaine au Congrès jette une ombre noire sur les intérêts arméniens

  • 18-11-2014 14:58:54   | USA  |  Articles et analyses

À l’échelle nationale, pratiquement tous les candidats au Congrès ayant soutenu les questions arméniennes ont été victorieux lors des élections du 4 novembre. Le résultat a été tout aussi positif pour les autres candidats qui se sont présentés aux élections locales et dans les États. Par conséquent, le Comité national arménien d’Amérique (ANCA) a annoncé que plus de 95% des candidats qu’il a appuyés ont réussi. 
Si traditionnellement tant les démocrates que les républicains ont soutenu les thèmes arméno-américains, des nuages noirs s’amoncellent au-dessus des initiatives arméniennes de lobbying à Washington, en raison des grands changements au nouveau Congrès, qui prendront effet en janvier 2015, lors de l’année critique du centenaire du génocide arménien. 
Plusieurs sénateurs clés démocrates et pro-arméniens vont perdre leur position de leadership du fait de la nouvelle majorité républicaine. Par exemple le sénateur Robert Menendez (D-NJ), noté A+ sur les questions arméniennes par l’ANCA, ne sera plus le président du Comité des relations étrangères. Il sera remplacé par le sénateur Robert Corker (R-TN), noté D+ par l’ANCA, l’un des cinq républicains qui avaient voté contre la résolution sur le génocide arménien en avril dernier. De plus, le leader de la majorité au Sénat, Harry Reid (D-NV), noté A par l’ANCA, deviendra le leader de la minorité. Il sera remplacé par le sénateur Mitch McConnell (R-KY), noté C+ et soutenu pour une réélection par l’ANCA. McConnell avait voté positivement sur plusieurs questions arméniennes.
La situation n’est pas vraiment meilleure du côté de la Chambre en ce qui concerne la position de son leadership sur les sujets arméno-américains. Le président John Boehner (R-OH), qui a connu une avancée rapide dans son parti, a annoncé lors d’une visite récente à Ankara que la Chambre des Représentants ne s’occuperait pas de la question du génocide arménien. Il n’est donc pas surprenant que l’ANCA l’ait noté C. Le président de la majorité à la Chambre Kevin McCarthy (R-CA), représente une lueur d’espoir ; noté B- et soutenu par l’ANCA, il a maintenu des contacts étroits avec ses électeurs arméniens. Heureusement Ed Royce (R-CA), noté A+ et appuyé par l’ANCA, restera président de l’important Comité des Affaires étrangères de la Chambre. 
Sans surprise, les médias turcs se sont réjouis des résultats des élections au Congrès. Les républicains sont en faveur de la Turquie sur la question arménienne a été l’un des grands titres de Sabah, un journal turc. Le journaliste Ragip Soylu a écrit : « Certains changements au sein du Sénat vont modifier la mauvaise expérience de la Turquie avec le Congrès. » « L’élimination » du sénateur Menendez de la présidence du Comité des Affaires étrangères « va améliorer la position inconfortable et faible de la Turquie au Sénat. » Le journaliste poursuit en qualifiant le contrôle républicain de la Chambre « d’une autre bonne nouvelle pour la Turquie car le président de la Chambre, John Boehner, a déjà promis de ne pas mettre la question arménienne à l’ordre du jour officiel de la Chambre. « Le Congrès ne s’impliquera pas dans cette question. Nous n’écrivons pas l’histoire, nous ne sommes pas des historiens », aurait-il déclaré lors de sa visite à Ankara en avril 2014. 
Dans un autre article de Sabah, Ilnur Cevik a écrit avec aplomb : « Les chances de la Turquie ne sont pas si mauvaises » au vue « des possibles problèmes posés par l’arrivée de la 100e année depuis les incidents de 1915 concernant les Arméniens à l’époque ottomane ». Cevik décrit les républicains comme n’étant pas aussi « combatifs » sur la question arménienne que les démocrates, « qui meurent d’envie d’apaiser le lobby arménien aux USA, et, par conséquent, ils seront plus réceptifs à une motion plus durement formulée vis-à-vis des Arméniens, plus particulièrement en 2015, à l’occasion du centenaire des événements survenus pendant la Première Guerre mondiale, quand les Arméniens vivant sous le règne ottoman ont été tués, ce que les Arméniens appellent de façon controversée un génocide. » 
Une autre publication turque World Bulletin a joyeusement intitulé son article : La victoire républicaine au Congrès bénéficie à la Turquie. L’article souligne que : « un Comité des Affaires étrangères du Sénat, dirigé par des démocrates, aurait été un cauchemar pour les relations américano-turques, car il en aurait résulté des projets de loi sur les revendications arméniennes de génocide lors des incidents de 1915 en Turquie orientale. » Soner Cagaptay, le directeur du Programme de recherches turques à l’Institut de Washington pour la politique au Proche-Orient, a confirmé l’orientation pro-turque du nouveau Senat, car « ce sont les républicains au Sénat qui ont bloqué les projets de loi sur les revendications de génocide à l’encontre de la Turquie. » Un autre expert, Kadir Ustun, a fait remarquer que la chance qu’une résolution sur le génocide arménien soit adoptée « est à présent plus faible que jamais, car les républicains contrôlent le Congrès. » 
Il incombe désormais aux Arméniens-américains ayant des liens forts avec les leaders républicains au Congrès de les convaincre de soutenir les initiatives arméniennes, tout en exposant le soutien de la Turquie aux terroristes de l’État islamique qui menacent les intérêts américains au Moyen-Orient. 
 
 
Harut Sassounian 
The California Courier 
 
 
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