Harut Sassounian. Le rabbin Shmuley et le Comité du Centenaire qualifient Obama de « menteur » dans une annonce du NY Times


Harut Sassounian. Le rabbin Shmuley et le Comité du Centenaire qualifient Obama de « menteur » dans une annonce du NY Times

  • 29-05-2015 11:03:04   | USA  |  Articles et analyses

Les commémorations du centenaire du génocide arménien ont été marquées par des développements sans précédent et parfois inattendus. 
 
L’un d’entre eux est l’annonce pleine page que le rabbin Shmuley Boteach, personnage bien connu et controversé (fondateur de The World Values Nerwork) et le Comité du Centenaire du génocide arménien (région Est, AGCC) ont fait paraître dans The New York Times le 18 avril. Le texte critiquait sévèrement le président Obama qui n’a pas tenu sa promesse sur le génocide arménien. 
 
Une source fiable a déclaré au California Courier que l’annonce avait contrarié certains officiels de la Maison Blanche. Sa parution a coïncidé avec les initiatives de l’organisation américaine Commémoration nationale du Centenaire du génocide arménien pour convaincre les officiels réticents de l’Administration de participer aux événements commémoratifs à Washington, D.C., du 7 au 9 mai. 
 
Néanmoins, le vice-président Joe Biden et l’ambassadrice américaine auprès des Nations Unies, Samantha Power, ont assisté à une messe œcuménique célébrée dans la cathédrale nationale le 7 mai à Washington, mais ni l’un ni l’autre n’ont prononcé une allocution, pas plus que leur présence n’a été annoncée. Étonnamment, les deux responsables portaient le pin « Ne m’oublie pas », représentant le logo officiel du Comité du Centenaire du génocide arménien. Le président Serge Sarkissian, le catholicos Karekin II et le catholicos Aram I étaient également présents. 
 
L’annonce payée dans le New York Times représentait un jeune garçon tenant une affiche sur laquelle on pouvait lire : « Président Obama, pourquoi nous avez-vous menti ? » Suivait le titre de l’annonce en grands caractères gras : « 1,5 million de victimes arméniennes crient du fond de leurs tombes : combien de temps encore allez-vous nier notre génocide pour apaiser le tyran turc ? » 
 
L’annonce critiquait sévèrement le président Obama, pour n’avoir pas tenu ses promesses de campagne, et l’ambassadrice Power, restée silencieuse après avoir pourtant condamné l’indifférence des États-Unis vis-à-vis du génocide dans un livre qu’elle a écrit avant de prendre ses fonctions au gouvernement (Un problème de l’enfer : l’Amérique et l’âge du génocide). L’annonce visait aussi le président turc Erdogan, le qualifiant de « tyran » et de « quasi-dictateur » qui a démantelé la démocratie turque. » 
 
Par ailleurs, l’annonce citait l’extrait d’un article du correspondant en chef de CNN à Washington, Jake Tapper : « Pour la sixième année consécutive, le président Obama a brisé sa promesse faite à la communauté arménienne, lorsqu’il cherchait à gagner son vote à l’époque où il était sénateur et candidat à l’élection présidentielle, d’utiliser le mot « génocide » pour qualifier les massacres d’un nombre estimé à 1,5 million d’Arméniens commis par l’Empire ottoman il y a un siècle. Il l’a fait par égard pour le gouvernement de la Turquie. » 
 
L’annonce rappelait aux lecteurs que Tapper faisait référence à la déclaration du sénateur Obama en 2008 : « Le génocide arménien n’est pas une allégation, une opinion personnelle ou un point de vue, mais plutôt un fait largement documenté et soutenu par un ensemble de preuves historiques. Les faits sont indéniables… En tant que président, je reconnaîtrai le génocide arménien. » 
 
Les auteurs de cette annonce poursuivent en affirmant : « Rarement un président américain a fait de fausses déclarations aussi effrontément sur un sujet d’une telle importance morale. L’aveuglement moral délibéré du président Obama contraste fortement avec la déclaration courageuse du pape François qui a appelé la semaine dernière à la reconnaissance mondiale du ‘premier génocide du 20e siècle’. » 
 
Dans l’annonce, le rabbin et l’AGCC ont posé la question suivante à l’ambassadrice Power : « En tant que voix majeure contre le génocide, allez-vous respecter vos propres principes ou après avoir pris vos fonctions, comme d’autres avant vous, allez-vous vous taire et devenir une partie intégrante du ‘problème de l’enfer’ ? » 
 
Une deuxième annonce parue dans le journal Los Angeles Times le 24 avril rappelait au président Obama sa promesse sur le génocide arménien. L’annonce de trois-quarts de page, placée par Ed Muradliyan, un homme d’affaires californien, affirmait : « Il est temps que vous soyez le dirigeant que vous aviez promis d’être. À l’occasion de ce 100e anniversaire, Monsieur le président, l’heure est venue de tenir la promesse que vous avez faite. » L’annonce de Muradliyan comprenait une photo du président Obama, une copie du télégramme de l’ambassadeur Morgenthau adressé au Département d’État en date du 16 juillet 1915 et le gros titre d’un article du New York Times daté du 15 décembre 1915. L’annonce se terminait par : « Il est temps de reconnaître le génocide arménien ». 
 
Si l’une ou ces deux annonces ont indisposé les officiels de la Maison Blanche, cela en valait la peine ! 
 
Les annonces auraient dû inclure les propres mots d’Obama, tirés de son livre L’audace d’espérer : « Dire une chose pendant la campagne, en faire une autre une fois en poste, et vous êtes un homme politique hypocrite typique. » 
 
Bien que les événements commémoratifs à Washington aient été organisés avec le plus grand professionnalisme, il y a eu une importante lacune : lors du Banquet du Centenaire le 9 mai, des distinctions spéciales ont été attribuées à des personnalités, des organisations et des représentants des pays qui ont reconnu le génocide arménien, mais il aurait été particulièrement indiqué de rendre hommage à John Evans, l’ambassadeur américain en Arménie (2004-2006), dont la carrière diplomatique a brutalement pris fin quand l’Administration Bush l’a rappelé car il avait reconnu publiquement le génocide arménien. Les organisateurs du Banquet ont assuré le California Courierque « ce n’était pas un manque d’égards intentionnel » mais simplement « un oubli ». 
 
Heureusement, cette grave erreur a été en partie atténuée lorsque « l’oubli » a été porté à l’attention du maître des cérémonies, l’avocat Mark Geragos, qui a annoncé sur scène la présence de l’ambassadeur Evans. Les 2000 invités du Banquet du Centenaire ont fait une standing ovation enthousiaste à l’ambassadeur Evans et un tonnerre d’applaudissements a retenti. Inutile de dire que l’ambassadeur Evans mérite bien plus que des applaudissements, puisqu’il a sacrifié sa carrière pour défendre la cause arménienne ! 
 
 
Harut Sassounian 
The California Courier 
 
  -   Articles et analyses