La diaspora doit investir dans ses institutions, selon le Primat des Arméniens de France


La diaspora doit investir dans ses institutions, selon le Primat des Arméniens de France

  • 27-10-2015 13:54:33   |   |  

Selon Monseigneur Vahan Hovhanessian, Primat du Diocèse Apostolique Arménien de France, l’aide à l’Arménie ne doit pas se faire au détriment de l’action pour la pérennisation des institutions de la diaspora arménienne. Le prélat revient également sur la crise des vocations, de l’image de l’Eglise en pays laïc, et sur les moyens en vue de les améliorer.

 

 

Nor Haratch : Nous nous sommes déjà rencontrés il y a un an à l’occasion de votre nomination. Quelle est votre appréciation de votre première année d’activité en tant que Primat du Diocèse de France et Délégué Apostolique pour certains pays de l’Europe de l’Ouest ?

Monseigneur Vahan Hovhanessian : Tout d’abord, je voudrais signaler que je me sens honoré d’avoir été nommé Primat de France car le Diocèse de France a une histoire, avec ses 27 paroisses (23 paroisses et quelques communautés sans lieux de culte ou sans pasteur comme à Strasbourg, à Toulouse ou à Romans). En tout cas, je suis ravi que la communauté de ce pays m’ait élu à la tête du Diocèse, avec la bénédiction de Sa Sainteté le Catholicos de tous les Arméniens, car ce Diocèse est l’un de ceux qui comprend le plus grand nombre de descendants de rescapés du génocide des Arméniens. Je me suis rendu compte que par exemple, par rapport au diocèse de la côte est des Etats-Unis, le vôtre est plus impliqué dans la vie arménienne, ici les célébrations et les homélies sont faites en langue arménienne et il existe sept écoles quotidiennes arméniennes. Aujourd’hui je me sens plus rassuré, car je suis mieux informé des problèmes du Diocèse et j’ai déjà préparé mon plan d’action pour les années à venir. Je voudrais signaler qu’après ma nomination en tant que Primat de France, j’avais adressé une lettre au Conseil diocésain pour que les problèmes existants soient étudiés et résolus avant mon installation en France, mais malheureusement rien n’a été fait à ce jour. Je considère essentiel de surmonter ces défis afin d’assurer la réussite de ma mission ecclésiastique.

NH : Pourriez-vous nous expliciter quels sont ces problèmes ?

MVH : Premièrement, en France dans laquelle le Diocèse est présent depuis un siècle et où notre communauté est considérée comme étant prospère, nous n’avons pas un bureau de la Primature et ni un secrétaire, comme c’est le cas des Diocèses de New York, de Los Angeles, du Canada, de Grande Bretagne ou de Moscou. Nous n’avons pas de personnel recruté pour des postes-clés comme la jeunesse, la communication ou les relations avec les familles. Ici nous avons seulement un secrétaire en la personne de Krikor Tavitian, qui est d’ailleurs une personne dévouée et de qualité. Je considère embarrassant qu’au XXIe siècle, le Diocèse arménien de France, qui est au coeur de l’Europe, soit dans une telle situation. De plus, le Diocèse n’a pas d’employé maitrisant le français, ce qui pose de graves problèmes.
Deuxièmement, les difficultés financières. Le système diocésain en France a été créé grâce aux efforts du premier Primat de France Monseigneur Norvan Zakarian, qui a dû mener un combat acharné pour instaurer ce creuset. Mais ce creuset a besoin de temps pour atteindre sa maturité, tandis que pour coordonner les projets il faut des moyens financiers. Malheureusement, le Diocèse ne dispose pas de ces moyens (le Diocèse avait seulement 300 € sur son compte bancaire au mois de septembre dernier). Vous comprenez qu’il est impossible de réaliser un quelconque projet dans ces conditions. Pour trouver une solution, nous allons organiser un dîner pour parler ouvertement de ces sujets avec notre communauté, nous allons leur présenter la situation actuelle de l’Eglise ainsi que nos projets d’avenir. Il faut être conscient que l’Église n’est pas la propriété ni du Primat ni du Conseil diocésain, mais celle du peuple, car c’est lui qui élit son Primat. Beaucoup de gens ont une idée erronée de l’Église en la considérant riche, prospère et avec un parfait système de fonctionnement. Pour cela, notre mission est d’informer de la réalité aux membres de la communauté concernant la situation financière de l’Église et leur expliquer que si cette situation perdurait, l’Église serait transformée en une structure   assurant seulement le service des cérémonies et de culte (messes, mariages, baptêmes et enterrements). Alors que l’Église est la colonne vertébrale de notre identité, elle est une mission vivante et non pas un édifice ou une coupole. Donc, lors du dîner diocésain, nous, le Primat et le Conseil diocésain, voulons transmettre un message positif à notre peuple pour lui dire que si nous parvenons à financer nos projets, nous réussirons dans notre mission.
En outre, nous avons l’intention de créer un fonds dont les intérêts annuels seront consacrés au financement du budget opérationnel courant du Diocèse mais aussi pour les projets d’avenir. Placé sous le contrôle du Primat, ce fonds sera ouvert à tous les donateurs, tandis que le Conseil diocésain aura, selon les statuts du fonds, le droit d’une voix.
De l’autre côté, il faut souligner que les paroisses font face à de grands défis et ne peuvent nous venir en aide financièrement.
Troisièmement, il y a le manque de ressources humaines et de prêtres. De plus, si un prêtre de  paroisse n’est pas francophone, comme c’est aussi mon cas, sa mission se limite à la communauté arménophone, et ceci pose des problèmes en sachant que presque la moitié des membres de notre communauté est francophone. Il faut également penser à préparer ces curés, sans oublier le fait que les frais annuels pour le séjour et la subsistance  d’un ecclésiastique est de l’ordre de 50.000 €. Je considère essentiel de souligner qu’il ne suffit pas de construire un édifice pour avoir une église ou un Diocèse …
Nous avons aujourd’hui un seul prêtre marié en service dans la prélature et qui assure, entre autres, le poste du grand sacristain de la Cathédrale.

 

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